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Eva David, de l’icône à l’icône

"Justes" au Chambon-sur-Lignon

Une visite chez Eva David peut changer toute vision du monde. La Bulgarie, pays de naissance de cette artiste hors normes, irradie de toute sa lumière mystique, tant dans les œuvres que dans l’intensité du regard. La capacité que confère l’icône à exprimer une forme cachée de ce qu’on peut appeler la vie, apparaît ici, dans cet atelier mystérieux de Paris.

À l’origine est le père, le peintre David Peretz, disparu en 1982 à Paris, et qui lui apprendra les indispensables rudiments de cet art qu’elle porte déjà très haut dès la petite enfance, ils ne se quitteront jamais.

De Bulgarie où les difficultés d’affirmer librement son art n’existent pas, ils rêvent de la France. En 1949, Israël accueille la famille qui séjournera quelques mois dans des conditions nomades, avant de rejoindre Paris, grâce à leur bonne étoile.

Eva assistera son père – qui fut l’élève d’André Lothe – dans ses recherches les plus minutieuses et plus tard, décidera de travailler à la transmutation du papier (300 grammes, précisément) en une alchimie que l’encre de Chine révélera. Il faut fairevivrece papier statique et rigide.

L’œuvre fera partie de l’articulation du corps, et l’eau, élément médiateur entre la matière inerte et la matière ravivée, en sera la clef.

Formée à la technique de la peinture à l’huile, selon les notions traditionnelles de la Bulgarie, elle se consacrera à cette quête qui consiste à élever comme une tour, le visible et l’invisible.

Eva rencontre au Louvre et au Prado, où elle passera des heures, les chefs d’œuvres de Goya et de Velasquez, ses maîtres depuis l’enfance, bien qu’elle soit également inconditionnelle de l’art africain. L’art est un médiateur de Culture.

Elle devient Eva David et commence très tôt à intéresser les mécènes. Elle entre alors dans de prestigieuses collections privées. Lorsque je lui demande s’il n’est pas trop difficile de se séparer de ses œuvres, elle répond: quand l’œuvre est aboutie parmi mille formes, elle ne m’appartient plus.

 

Sa rencontre avec le poète et critique d’art Jean-Dominique Rey, fera naître une période sublimée par la beauté. La pensée, le bonheur, l’intellect, semblent extraire de cette fusion des esprits, une substance presque surnaturelle. L’Or apparaît en contact direct et transgresse le chemin chaotique de l’existence de l’humain. Onirisme et orphisme ne feront qu’un. » L’art est une écriture où beauté, tempo, génie universel se concentrent, comme quand on traverse un rayon de soleil. Le génie est l’étincelle juste de ce qui s’avère grandiose, dit l’artiste. « 

Ici, dans son atelier, sur fond de musique de Bach, Eva se confond à son art. Elle dit:

L’Amour est plus fort que le corps et les maux n’existent que pour nous montrer que Dieu nous met à l’épreuve parce qu’il nous aime. On ne peut créer sans s’initier, créer comme un ruisseau qui coule, sans ego, sans tricherie. L’art, c’est pour aller vers l’absolu.

Les œuvres d’Eva David seront exposées à l’école ainsi que dans la somptueuse salle des sports du Chambon-sur-Lignon, comme une conversation avec les enfants. Rappelons que cette ville située au cœur de l’Auvergne, regroupe le plus grands nombre deJustes, et cet événement symbole de mémoire, rend hommage aux familles qui ont protégé plus de 3500 enfants durant la guerre, le cœur de la cachette étant précisément l’école.

Mylène Vignon