Ya Ping Fan

Parcours d'humanité 

Dès les premières secondes d’observance de cette œuvre, on devine que l’esprit dépasse de très loin le visible. Ya Ping Fan, peint depuis l’âge de trois ans, guidée par son père, un calligraphe réputé dans toutes les provinces de la Chine, avec lequel elle se rend à la rencontre des plus grands maitres.

Au cours de ses périples, âgée de douze ans à peine, elle prend conscience que musique, la philosophie et les arts plastiques ne font qu’un, elle découvre alors l’harmonie et comprend que son destin est tracé.

Au commencement, elle aborde les rudiments du dessin traditionnel de son pays: encre, calligraphie et une certaine philosophie que lui transmet sa mère, bouddhiste pratiquante. Puis, elle fréquente très rapidement les académies, en Chine, Beaux-arts de Guangzhou, puis en Occident, pour apprendre la peinture à l’huile et la photographie, qu’elle enseignera plus tard, munie d’un doctorat.

Ya Ping Fan, en humaniste convaincue, élargit l’espace mental de sa réflexion sur la théologie et la philosophie de l’Est comme de l’ouest avec une profonde conscience du sacré. Face à ses grands tableaux sans concession, on décèle une forme de violence quasi masculine. Elle explique que pour sonder l’esprit, le niveau de sagesse est égal que nous soyons hommes ou femmes. C’est l’esprit, affirme t-elle, qui accompagne le geste.

Dans ses impressionnantes gravures sur bois, elle s’investit physiquement et mentalement avec une puissance optimale. Lors d’un voyage à la mer, elle est venue à bout d’une série de 6 gravures en seulement 18 jours, sans se nourrir. La taille démesurée de ses gravures nécessitait de travailler sur des arbres très anciens, sur lesquels elle gravait en creux, avec le souci de ne pas les blesser, étendant ses bras au maximum dans une étrange et nécessaire chorégraphie. Elle exprime alors la relation humaine face à l’immensité de la mer.

Mais la puissance rejoint la grâce, lorsqu’elle aborde l’histoire de cette poupée, déclinée en un vaste univers où l’émotionnel est palpable. Elles parlent à notre féminin profond, que nous soyons femme ou homme, exprimant des sentiments comme surgis de l’âme des temps anciens. Elles apparaissent en installations au centre de l’espace, parfois enceintes, nues ou richement habillées. Les vêtements sont réalisés par l’artiste elle-même.

Avec beaucoup de pudeur et parfois de crainte dans le regard, elles se sont laissé photographier pour enrichir cette fabuleuse exposition.

À seulement trente-cinq -huit ans, l’artiste est une valeur incontournable dans son pays, ainsi qu’à l’internationale, elle expose au Musée d’Art National de Pékin et figure dans de prestigieuses collections privées.

Ya Ping Fan se livre avec générosité à Saisons de Culture. En conclusion, elle nous confie avoir la certitude que le talent de l’artiste est un véritable cadeau du ciel.

Inspirée par la France et son histoire, elle rêve aujourd’hui d’une exposition gigantesque, pour exprimer toute l’étendue de son art et transgresser ainsi le climat ambiant.

Espace Commines, 17 rue Commines – Paris 3ème

Jusqu’au 8 septembre 2017 inclus

Commissaire: Christian Noorbergen

Mylène Vignon