L’Abstraction Lyrique en majesté
Par Cyb, peintre et amie de Georges Mathieu
« Enfin un calligraphe occidental » aurait dit Malraux à propos de Georges Mathieu. Nous pourrions nous exclamer : « enfin une exposition digne de Georges Mathieu », de sa fougue, de sa complexité, de son originalité et de son apport majeur à l’art du XXème siècle.
Tout d’abord l’écrin. Les splendides salons de l’Hôtel de la Monnaie correspondent parfaitement à sa personnalité éprise du Grand Siècle, à son être contrasté, à son sens du panache. Cet écrin invite à la découverte ou à la re-découverte du Maître de l’Abstraction Lyrique.
Le parcours aiguillonne sensibilité et intelligence. Les différents temps de l’exposition, scandés par des textes pertinents, rendent justice à la variété des approches, des matériaux, des supports, des sujets. Les films choisis le montrent dans la concentration intacte du geste et du combat pictural, « seul face au vide » disait Mathieu.
En parcourant cette magnifique rétrospective j’ai retrouvé quelque chose de sa personnalité passionnée, radicale, mais aussi généreuse. Car du partage de l’art et de l’énergie, il était aussi question dans cette multiplication des supports de création. Nul n’a su me dire si Georges Mathieu était aristocrate, quand il signait parfois ses lettres « Georges Mathieu d’Escaudœuvres », mais assurément il avait un haut sens du meilleur, et une grande conviction que ce meilleur, chacun pouvait être incité à le conquérir avec fougue et panache. Forger son blason, s’élever à inventer son propre style.
En ce sens, l’exposition « Graffiti X Georges Mathieu » qui suit la rétrospective du Maître, constitue bien l’un des échos possibles à l’œuvre de Mathieu. JonOne, Nassyo ou Lek & Sowat lui rendent un hommage appuyé et vivifiant. Car comme il l’écrivait dans l’un de ses textes, De la révolte à la renaissance : « C’est bien là, la leçon de l’Abstraction Lyrique, qui plus qu’aucune autre esthétique, plus qu’aucune autre éthique, a prôné les vertus de spontanéité, d’improvisation, de fantaisie, de révolte, de dynamisme, de risque et de liberté vis-à-vis des références, donnant ainsi ses chances maximales à la créativité. »
Ma reconnaissance reste entière, en tant que peintre, envers celui par lequel je suis entrée en abstraction, une étape décisive pour former mon vocabulaire d’artiste.
Rétrospective Georges Mathieu
« Geste, vitesse, mouvement »
Exposition par le Centre Pompidou et la Monnaie de Paris
Monnaie de Paris, 11quai Conti, Paris, 6ème
Jusqu’au 7 septembre 2025
« Graffiti X Georges Mathieu » en écho à la rétrospective Georges Mathieu
Bibliographie
Georges Mathieu, De la révolte à la renaissance (1972), L’abstraction prophétique (1984)
Évocation des rencontres et de ma correspondance avec Mathieu dans mes deux livres Baroque Abstrait (2018) et Jaune, rouge, bleu (2020) aux éditions Area paris.