Portraits

Constantin XENAKIS

L’impossible et le sacré

C’est avec une certaine émotion, que je me suis retrouvée dans l’intimité de l’appartement parisien de cet artiste hors normes de notoriété internationale. C’est dans son «dépôt» que j’ai passé ces quelques heures inoubliables à écouter la voix de la sagesse, me conter de belles histoires de vies, comme cette rencontre avec Man Rey, lorsqu’il était jeune artiste en 1967 ou quand un ami lui confiait : – Vous avez vu, il y a un jeune qui empaquette comme vous, il s’appelle Christo.  Il a alors répondu : tant mieux !

Man Rey lui avait dit devant son œuvre :  Vous savez, il faut faire des choses qui vont résister dans le temps.

Il se retrouve par les hasards de la vie, voisin de Buren encore inconnu.

On lui propose une exposition au musée Galliera en compagnie des Nouveaux Réalistes organisée par Pierre Restany, intitulée « Le décor quotidien en 1968 ». C’est sa première exposition à Paris dans le cadre d’Action Environnement Personnel.

La Pologne l’accueille princièrement, malgré les difficultés ambiantes. Visite de l’Ecole des Beaux-Arts et de l’Académie de Musique de Cracovie…

Il y rencontre beaucoup d’artistes dissidents. C’est grâce à l’une de ses expositions que Kantor va renouer des liens avec la galerie Pryzmat qui l’accueille.

Il retrouvera plus tard  Pierre Restany, Delvaux, Olivier Debré, Corneille, puis le mime Marceau qui a écrit en 1969 sur son oeuvre théâtrale : J’ai assisté hier au miracle de l’univers intemporel de Constantin Xenakis (…)

Il s’est senti particulièrement heureux durant cette riche période polonaise.

Ensuite, son talent l’a conduit dans le monde entier.

Autour de nous, dans le fameux «dépôt» à peine quelques œuvres de lui, mais on peut admirer des tableaux de ses amis, dont de très intéressants Kijno.

L’atelier principal est à Athènes, la ville de ses origines familiales, bien qu’il soit né en Egypte.

C’est le lieu de créativité, de réflexion et aussi une sorte de terre d’accueil sous le soleil pour recevoir les amis.

Les signes-cônes et les alphabets sont chez Constantin Xenakis un terrain de recherche inépuisable. On les retrouve aussi sur des kakemono, très faciles à transporter pour un grand voyageur mais je ne me contenterai pas de cette explication qui est certainement un prétexte qui cache un parti-pris intellectuel et plastique !

Toute son œuvre révèle incontestablement un mouvement de poésie visuelle. Il assemble des couleurs franches d’une fraîcheur qui exalte le discernement.

J’ai aussi adoré cette étrange et belle écriture, un journal illisible en langue Xenakis titré : « L’art est un bluff ».

J’ai très envie de proposer ce travail au musée du manuscrit de Paris !

Dans son livre Xenakis par Xenakis, il a écrit : Quand je ne peux pas parler des choses clairement, je me tais et c’est alors que je commence à peindre !

Et encore : La peinture cesse d’avoir une direction lorsque l’on veut exprimer la peinture comme la peinture.

A quatre-vingt-deux ans, Il me confie son projet de rédaction d’un nouveau livre : De l’expérimentation de l’avant-garde jusqu’à la commercialisation de l’art qui n’existe plus de la même façon.

En août, il exposera en Grèce sur l’ile d’Egyne en compagnie d’un jeune plasticien qui partage les mêmes courants de pensées, dans une maison qui appartient à la ville. Une œuvre plastique et littéraire.

Deux ouvrages vont paraître prochainement aux USA.

Un film sur You tube…

Une parution actuellement dans le Contre-Annuaire 11 13 éditions.

Bravo l’artiste et à bientôt pour une spéciale « Secrets d’ateliers » sur BDM TV.

www.constantinxenakis.com

Mylène VIGNON