Portraits

Andelu

Par Mylène Vignon

C’est dans son atelier de Vallauris situé dans le sud de la France, que j’ai pu mesurer l’importance de l’œuvre de Mireille Andelu. Les sculptures s’imposent dès le seuil,  côtoyant en un espace partagé, l’œuvre peint.

Dès 1969, avec son mari le peintre graveur James Coignard, elle travaille avec l’artiste franco-américain Henri Goetz, initiateur de la gravure au Carborundum. Cette rencontre déterminera ce qui va devenir une passion. Après avoir au préalable exploré le textile comme art intimiste et réussi dans cette voie jusqu’en Amérique, elle se lancera dans cette technique très particulière qui ajoute de l’épaisseur à la gravure traditionnelle.

En 1969 elle prend son nom d’artiste Andelu. Elle sera elle-même le mentor d’une jeune équipe d’artistes curieux de cette discipline exigeante, qui fondera l’atelier Pasnic. Souvenons-nous que Pascal Gauvard et Nicolas du Mesnil du Buisson avaient initié ce fameux sanctuaire de gravure parisien.

Aujourd’hui, en son atelier de Vallauris, Andelu utilise toujours comme supports, ses somptueux papiers d’origine réalisés à la main. Laissant parfois de côté la gravure, elle se tourne en chercheur perpétuel, vers la création d’œuvres uniques aux techniques mixtes,  qui font bien évidemment référence à la matière si particulière du Carborundum.

Elle aborde des sujets issus d’un monde subtil, où le visiteur voyage à travers la planète,  et même bien au-delà. Ces errances nous transportent au pays des Hommes volants, des chiens rouges ou bleus, des ciels dorés, dans la réalité augmentée d’un univers tant onirique que sérieux.

L’essayiste Jean-Paul Gavard-Perret a analysé ainsi son œuvre ;

chaque toile devient un seuil qui envoûte et qui harcèle de ses lumières réticentes. Sur leurs étranges échelons tâtonnent dans la pénombre sur la pierre de la couleur rouge profond ou bleu, qui épaissit l’attente. Les oiseaux qui parcourent parfois les ciels bouchés se sont tus depuis longtemps, même s’ils ouvrent encore un chemin au vent. La lumière burine l’instance de leur visage anonyme comme rongé par l’ennui. Au sein de la couleur et pour toute veine, celle qui dessine leur contour de failles(…)

 

Une vraie histoire de famille, ainsi que nous les aimons à Saisons de Culture, car la fille de Mireille et James, Emmanuelle Renard, atterrie elle-même sur la planète « gravure » dès sa petite enfance, excelle elle aussi dans cette discipline. Nous avons eu le plaisir de retrouver mère et fille récemment,  sur les cimaises de la galerie Terrain Vagh dirigée par Moufida Atig, à Paris, grâce à l’artiste Sophie Sainrapt, graveur elle aussi et digne successeur de l’atelier Pasnic.

Andelu nous a Honorés de la première de couverture de notre média durant l’automne 2022. Qu’elle en soit remerciée.