FIAC FIAC 2018 !

Par Esther Ségal

Pour cette 45ème édition, la FIAC est placée sous le signe de la sagesse. Des œuvres pures, efficaces, synthétiques, muséales pour la plupart, éprouvées par le temps, défendues par des galeristes tels que Perrotin, Kamel Mennour, Loevenbruck, Templon, Lelong, Obadia, Thaddeus Rappac. Il y avait très peu de débordements audacieux cette année, même si 25 pays étaient représentés, à l’exception de la galerie Gagosian, qui présentait l’installation grandeur nature «Ingres Wood » (2018) de Katharina Gross, nous exposant généreusement les fragments d’un arbre planté par Ingres, recouverts de couleurs franches et bordés d’undrapé quasi mystique. Il y avait aussi dans la même fibre spectaculaire, la flamboyante galerie Gmurzynska, mise en scène par le designer Alexandre de Betak renfermant des trésors d’artistes ayant joué avec le feu, notamment Otto Piene et son « dotdotdot » (1957/1982/1988) fait de feu, de fumée et d’huile sur carton. Pour les 191 galeries restantes, on allait à l’essentiel, couleurs, matières, abstractions, art moderne, dans un large éventail de l’art en train de se faire. « L’oiseau solaire » de Miró côtoyait « la cage aux lions » de Gilles Aillaud et de nombreuses œuvres s’affrontaient ou se confrontaient selon notre point de vue. Une mention toute spéciale pour la galerie Italienne Tucci Russo, tout en finesse, plébiscitant des « œuvres d’esprit » exceptionnelles de l’artiste Giuseppe Pénone et un coup de cœur tout à fait particulier pour la création « Phase of Nothingness – Cloth and Stone » (1970) de Nobuo SEKINE présentée par la galerie Natalie SEROUSSI qui montre une toile blanche resserrée en son milieu par une corde au bout de laquelle pend une pierre. 

Une grande œuvre pour ma part, voir prophétique… du rapport ambivalent, de force et d’équilibre qui se joue entre l’artiste et le marché de l’Art lors de cet événement incontournable de Paris. 

Car La FIAC, c’est quatre jours pour faire et défaire l’histoire de l’Art, on parle alors sans retenue de cote, de prix, de ventes et de rachats… mais on oublie le rocher  et surtout celui qui pousse ce rocher sur la côte ! Si « l’artiste Sisyphe » insuffle à ce rocher, du génie… le marché de l’Art lui donne de la matérialité et du poids… quatre jours pour monter cette côte, voilà aussi ce qui se joue derrière les murs de ce « temple » où marchands et artistes dialoguent. 

Une FIAC qui embrasse de multiples évènements hors les murs, mais aussi des foires extérieures comme autant de ramifications guerrières. Art Elysée, Asia Now, Outsider Art…. Tout l’univers artistique confondu se lève d’un seul bloc pour épouser le mythe de l’artiste qui hélas « ne roule pas sa bosse » mais « pousse sa pierre » avec persistance, avec endurance etle courage de ses opinions. Il faut leur rendre hommage à tous car c’est la résistance au sein d’une politique sélective de toutes ces galeries et de ces artistes qui crée l’évènement et l’entité FIAC ! Il faudrait même aller plus loin et donner à la photographie et aux arts numériques une vraie place au sein de cet évènement car aujourd’hui, l’Art a changé, les artistes ont changé et le collectionneur averti se doit de promouvoir cette émergence et l’apprenti collectionneur d’être instruit de ce changement pour participer à cette nouvelle page qui se tourne et la FIAC en a la responsabilité. Alors…, à quand la Foire(s)Internationale d’Art Contemporain ?