Regards

Chambre 212

Par Pascal Aubier

Un film de Christophe Honoré avec Chiara Mastroianni, Benjamin BiolayVincent Lacoste et Camille Cottin.

On aime beaucoup Chiaraa Mastroiani, on est allé la voir et on est sorti du film bien triste, ma femme et moi. Cet Honoré l’avait fort abimée. Pourquoi ? Pourquoi la filmer si mal, presque méchamment. À moins qu’il n’ait pas pu faire mieux… Pas voulu. Beaucoup de gens font grand cas de ce film.  À Télérama, ils ont carrément perdu la tête. Souvent le magazine donne deux critiques, l’une pour, l’autre contre, ou moins laudatrices. Cette fois ils crient au génie à tue-tête. Alors nous sommes tombés de haut, encore plus évidemment.

J’ai une amie qui habite rue Delambre et qui était ravie qu’on y ait tourné le film et fait tomber de la neige hors saison. La magie du cinéma ? Ce ne sont pas les trucs techniques qui nous le font aimer, c’est l’émotion qu’il nous transmet. Les techniques aident à construire, c’est au metteur en scène de mettre en scène, d’animer ses personnages et ses lieux. Dans la Chambre 212, tourné mi-en studio, mi-en décors naturels, il n’y a point d’émotion qui ait pu nous saisir en dépit des prouesses d’écriture.

À part ça, nous nous retrouvons dans un Vaudeville moderne. Et pourquoi pas ? Cela peut être très bien. Par exemple au Théâtre, nous sommes allés voir une comédie très charmante, Nobody is Perfect, écrite par Madame Sabine Hogrel que nous connaissions du Café de Flore et dont nous n’avions encore rien vu. Eh bien Bravo Sabine, un texte réjouissant et rebondissant, des acteurs épatants et la Salle Anémone remplie d’applaudissements.

La chambre 212 ne donne pas cette envie d’applaudir. L’introduction de la magie, du surnaturel, un peu à la Raisnais, ne suffit pas à nous transférer la joie cinématographique. Biolay, le mari épuisé et cocu, n’a rien à envier à Vincent Lacoste, le mari jeune et fringuant. La pauvre Chiara qui doit tromper l’un avec l’autre ne se remettra pas de son amertume et quand surgissent une vingtaine de ses amants, de toutes couleurs et de tous genre cela ne fait qu’encombrer l’écran sans aucune inspiration de la part de l’auteur, comme de celle du spectateur.

Un ultime fantôme surgit à la porte du vieux mari perdu : sa prof de piano dépucelatrice, une certaine Camille Cottin, au visage intéressant, au nez aquilin qui la rend très belle. Et reviennent les émois de grande jeunesse. Le rêve : coucher avec sa prof de piano ou son institutrice ou avec la grande fille du proviseur.

On ne sait plus où on est, ni comment cela va finir. Le réalisateur et les protagonistes non plus. Et Katy qui habite rue Delambre s’est endormie devant l’écran confus .

Je crois que Chiara sortie de l’hôtel cis juste en face de l’appartement qu’elle partage depuis près d’un siècle avec son mari Biolay, croise celui-ci dans la rue et lui dit qu’elle rentrera peut être ce soir après la fac où elle est prof.